Nano. RolePlay

Rappel du premier message :



Patya se faufile dans une ruelle au pas de course. Sans ralentir, il tourne au coin et manque de renverser un passant et son violon. Il s'excuse platement, s'assure que tout va bien, salue d'un petit geste et repart en courant, son paquet bien serré sous le bras.

En ce début d'automne, il fait encore doux, son pull lui tient trop chaud. Les joues rouges, il grimpe un escalier quatre à quatre et longe une passerelle à fond de train. Le métro passe comme un fou à sa droite, mais il l'ignore. Il file à l'opposé et s'arrête devant une entrée où il sonne avant d'être avalé par le bâtiment.

Quelques minutes plus tard, le revoilà. Il jette un œil à sa montre et part en direction du chantier. Voilà pourquoi il aime cette course. Le client n'est pas seulement à deux pas de la future cathédrale, il est aussi réglé comme du papier à musique. Patya va pouvoir profiter chaque semaine des avancements des travaux. C'est ma bonne étoile, pense-t-il en arrivant devant le Mémorial.

Il ne vivait pas encore à Moscou lors de l'attentat. Sa famille s'était beaucoup inquiétée pour son frère aîné dès que la nouvelle avait atteint le village. Le télégramme avait rassuré tout le monde, mais le choc n'en était pas moindre. Après son arrivée, Patya avait mis des mois pour aller s'y recueillir. Voir les blocs de pierres éparses et les gerbes de fleurs un peu partout avait eu sur lui un impact bien plus grand que les photos des journaux.

Chez ma mère. Viktor grimace puis son rictus se transforme en demi sourire ironique. C'pas si pire j'imagine. Elle cuisine bien. Et y a que'ques jours par an où e'me crie pas d'sus. Un moment il est tenté de poser plus de questions sur la famille de Patya, ses frères et soeurs, mais alors il faudrait qu'il parle de la sienne et il y tient pas. Il embraye donc sur autre chose. Mais y s'pourrait que j'bouge bientôt. Avec mon pote Vez on s'trouverait bien un coin à nous où personne nous d'manderais des comptes.

Oh, trop cool ! s'exclame Patya. Il ne lui serait pas venu à l'idée d'habiter avec des amis, mais le principe lui plaît beaucoup. Et d'embrayer sur le pote en question : Vez, il bosse aussi sur le dirigeable ?

Ouaip, il est garçon d'cabine lui aussi. Viktor grimaça aussitôt ; ce "aussi" méritait quelques explications : c't'à dire qu'j'suis pas encore tout à fait gabier, tu vois ? J'm'entraines pour ça mais l'capitaine dit qu'j'suis trop jeune.

Ah mince, sérieux ? Patya est déçu. Mais pas parce que son ami n'est pas vraiment gabier, plutôt parce qu'on ne le laisse pas l'être. Pourtant t'as l'air de faire ça comme un pro ! Avec ce qu'il vient de vivre à flanc de dirigeable, il a dû mal à en croire ses oreilles.

L'espace d'une seconde, Vik est vraiment inquiet que Patya le méprise parce qu'il s'est survendu. C'est irrationnel mais même s'il a confiance en lui, il reste un adolescent très sensible aux opinions des autres - surtout ses amis. La protestation de Patya le rassure et il se morigène intérieurement, agacé contre lui-même. Merci, il répond avec un petit sourire. Il y a un petit moment de blanc confortable alors que Vik finit d'enrouler sa corde et passe à la deuxième. Tu comptes rester coursier longtemps, toi ?

HRP :

Patya aime bien ses moments-là. Quand tu peux rester silencieux avec quelqu'un sans être mal à l'aise, c'est le signe que c'est un ami. Il regarde Vik enrouler les cordes avec des gestes rodés. Ces histoires d'âge, c'est nul. C'est clair que le garçon est déjà un vrai gabier. Je sais pas. Pour le moment je me pose pas la question. En fait j'adore courir, donc ça me convient bien.

HRP :

Viktor approuve. Si Patya est bien là où il est ça sert à rien de se prendre la tête pour plus tard. On a d'la chance au final, hein ? D'pouvoir faire c'qu'on aime et travailler là où on aime pour gagner not'vie. Ca le rend un peu songeur de penser à ça. Ca lui rappelle une vieille colère aussi, mais il est de trop bonne humeur pour la laisser se réveiller.

Oui, on a de la chance ! Patya écarte lui aussi une pensée moins heureuse qui s'insinue dans son crâne tandis qu'il confirme les dires de son ami. D'ailleurs, quand on y pense, de la chance il en a effectivement à revendre depuis dix ans déjà. Un jour on m'a dit : "Faut être heureux de ce qu'on a". Courir, ça me rend heureux. Te balancer au bout d'un filin, ça te rend heureux. Tant qu'on a ça, c'est le principal. Il fait un grand sourire et pointe ses index en révolver vers son ami dans une attitude super-cool-bro.

Viktor ricane parce que bon... il aurait des trucs à dire sur la coolitude de cette pose-là, quand même. Et si sur le fond, il n'est pas sûr d'être d'accord, il n'a pas non plus envie d'en débattre avec Patya. Oui c'est son ami, mais depuis ce matin seulement, et il y avait certaines convictions qu'il valait mieux garder pour soi, dans leur pays. C'est ça, cow-boy. Bon, j'ai fini. Et j'ai promis à ma mère que j'serais là pour le r'pas, donc faut pas qu'j'tarde trop.

Patya lève son poignet. Oh wow, j'avais pas vu l'heure ! Le temps avait filé plus vite qu'un dirigeable lancé à pleine allure. T'as raison, faut pas que je tarde non plus ; des fois ma belle-sœur s'inquiète quand je suis en retard. Une vraie petite maman, quand elle s'y met. Il rigole bêtement. Ça le gêne un peu, à son âge et après deux à Moscou, mais ça lui fait aussi plaisir de savoir que deux personnes l'attendent pour le dîner.

Moooh, le pauv'garçon à sa p'tite maman, se moque gentiment Vik en passant familièrement un bras autour des épaules de Patya. Moi, c'est surtout des coups d'louche que j'risque de m'prendre ! Vik laisse Patya descendre l'échelle du nid de pie en premier puis ils dévalent les escaliers. Bon... J'sais où tu travaille maintenant, ça t'dirait qu'on traine ensemble d'temps en temps ? demande Viktor quand ils se retrouvent au pied de l'Anouchka.

Pas besoin de lui demander deux fois. Sûr que c'est lui qui aurait proposé si Vik ne l'avait pas devancé. Carrément ! Je vais même apprendre les horaires de l'Anouchka par cœur pour savoir quand t'es là !

Super ! C'pas dur, c'est pareil chaque semaine. Attends, j'vais t'noter ça sur un papier. Il y a quelques petits bureaux près de l'entrée du hangar et Viktor y entraine Patya et gribouille sur un morceau de papier les informations importantes concernant l'Anouchka. Voilà ! Enfouissant ses mains dans ses poches, il adresse un sourire taquin à Patya. On s'revoit pour la belle alors ! Que j'te montre pour de bon qui est l'meilleur !

Patya fourre le papier dans sa poche et rit de bon cœur. Ouais ouais, répond-il, goguenard. Peut-être qu'on va avoir un gros twist parce que c'est pas çui qu'on pense. Il lève la main pour toper avec Vik.

On verra ça, réplique Viktor, crâneur, en topant dans la main de Patya. Ils marchent ensemble jusqu'à l'extérieur puis Vik salut de deux doigts à sa tempe et s'éloigne d'un bon pas. A plus, Patya !

À plus Vik ! répond Patya avec un signe de la main. Il s'éloigne d'un pas rêveur, très heureux du moment qu'il vient de passer. Peu à peu, il accélère puis se met à courir pour évacuer l'excitation qui coure dans ses muscles.
Vivement la prochaine course !