Mois 8 de la Guerre des Clones, 22 av. B.Y.

« Séquence d’atterrissage terminée, porte déverrouillée, Général. » Général. Un titre dont Moira se serait bien passé. L’Ordre Jedi avait vocation à protéger la paix, pas à mener une guerre. Mais le Conseil semblait d’avis que l’un ne pouvait pas aller sans l’autre ces temps-ci. Triste époque. Elle repoussa ces pensées peu productives pour se concentrer sur sa mission présente. Si elle et son coéquipier étaient efficaces, il y aurait au moins une bataille de moins dans cette guerre. « Ouvrez la porte. »

HRP:

Le Chevalier Cholena méditait dans ses quartiers quand il sentit la navette se poser. Il ouvrit lentement les yeux et déplia son corps en réveillant ses muscles détendus par la méditation pour ramener un peu de vie dans sa démarche. "Commandant ?" Il ne savait toujours que penser de ce titre militaire. Il ne lui plaisait pas, pour sûr, mais il ferait son devoir. "Je suis prêt, Capitaine Plume." dit-il en souriant doucement alors que la porte s'ouvrait devant lui pour dévoiler le capitaine clone au visage marqué par un tatouage qui lui valait son nom. Le Jedi rejoignit rapidement le Général Moïra, ses griffes cliquetant élégamment sur le sol.

Le capitaine Ryen donnait les dernières instructions à ses hommes quand l’autre Jedi les rejoignit. « Allons voir ce que les Séparatistes ont promis aux Nanitae. » « Du vent, probablement. » La canne-droïde de Moira avait un avis aussi tranché que d’habitude. « Ca ne les empêche pas d’être convaincants, a fortiori pour une planète aussi isolée. » La République n’était sans doute qu’un concept lointain pour les autochtones, et une offre juteuse était séduisante, quelle qu’en soit la source.

"Qui nous dit, Aisling, que le vent n'est pas convoité par les Nanitae ?" demanda doucement Cholena avec un petit sourire en coin. Il avait fallu du temps pour que le Chevalier, plus que timide dans ses relations sociales, se détende suffisamment pour oser taquiner ses partenaires de mission. Il ne se retenait plus maintenant. "Il y a bien des choses que nous ignorons sur ce peuple inconnu de la République. Plus que jamais, nous devons laisser la Force nous guider." ajouta-t-il d'un air plus sérieux. Le Capitaine Plume se matérialisa soudainement à ses côtés avec un boîtier. "Général, Commandant, voici les lentilles pour voir les Nanitae."

Moira sourit en entendant le chevalier répliquer au commentaire d’Aisling. Elle était heureuse que son partenaire de mission soit sur la même longueur d’onde qu’elle et ne fasse pas partie des membres plus impulsifs de l’Ordre. Elle prit le boitier des mains du capitaine du 317ème régiment. « Merci, Capitaine. » Elle appliqua les lentilles dans ses yeux et vérifia que Cholena avait eu le temps de faire de même avant de passer la porte.

Même s'il était finalement devenu adroit avec ses griffes - après des heures de doute, le double de méditation et le passage chez un professionnel des ongles et de leur entretien - il y avait toujours une petite appréhension quand il les approchait de son visage. Cholena pouvait sentir sur lui le regard inquiet du Capitaine Plume (et du reste du bataillon Volée du 317e régiment qu'il commandait). "Peut-être aurais-je besoin d'un petit peu d'aide." dit-il en tendant ses propres lentilles à son second. Autant rassurer l'esprit de l'homme, il serait plus efficace sur le terrain. Et ce serait inconvenant d'apparaître balafré auprès des Nanitae.

Après les lentilles, ce fut au tour de Ryen de tendre un boitier aux deux Jedis. « Et des amplificateurs sonores modulables pour entendre les Nanitae. » Les clones, eux, pourraient compter sur leurs casques pour cela. Moira inséra les siens dans ses oreilles. et se tourna vers les deux bataillons. « Vous connaissez notre mission, je ne vous la répéterai pas. Les Nanitae se montreront peut-être peu accueillants à cause de ce que les Séparatistes ont pu leur raconter. Ne réagissez à d’éventuelles provocations que si nos vies sont directement menacées. »

Une fois encore, Plume prit les appareils pour les placer délicatement sur les oreilles de son Commandant jedi qui se laissa faire, convaincu par les regards de mères poules que lui lançait sa Volée. Les derniers mots du Maître jedi lui fit tourner la tête vers les clones, un sourcil arqué : "Mais essayez de différencier les moments où nous semblons être en danger de ceux où nous sommes en danger. Nous ne sommes pas adeptes des négociations musclées de Maître Kenobi mais il peut nous arriver d'en copier certains traits si besoin." Malgré sa taquinerie apparente envers le célèbre Négociateur, on sentait son admiration dans sa voix.

Ces dernières recommandations données, Moira se retourna et passa la porte pour aller à la rencontre du comité d’accueil Nanitae. Elle savait que son escorte clone n’appréciait pas de ne pas pouvoir sécuriser les lieux auparavant, mais elle avait insisté pour qu’elle et Cholena débarquent en premier. Ils venaient en négociateurs, non en conquérants (sans compter que tous deux avaient suivi un entrainement en combat au moins aussi poussé que leurs hommes).

La vision qui les accueillit hors de la navette était des plus dépaysantes, compte tenu de l'emplacement du Temple sur la planète-ville de Coruscant. Le peuple Nanitae était peut-être microscopique mais une faune et une flore géantes s'étaient développées de façon luxuriante sur l'ensemble de la planète. Des arbres à l'écorce bleutée dont il ne voyait pas la cime s'élevaient majestueusement autour d'eux, nimbant les rayons solaires des lueurs pastels de leur feuillage. Une piste menait de l'aire d'atterrissage jusqu'à une petite clairière où deux pierres rembourrées de mousse turquoise semblaient les attendre.

La faune luxuriante rappelait sa planète natale à Moira, rurale et loin du coeur de la République. Pas de comité d’accueil en vue, mais le chemin à suivre était clair. Il y avait de la tension dans l’air, et pas que celle de leurs escortes. « Nous ne semblons pas être les bienvenus », commenta-t-elle doucement. Elle avança néanmoins calmement vers la clairière. Une poignée de Nanitae attendait sur une pierre. « Armés jusqu’aux dents, les diplomates du Sénat. » La voix fluette était accusatrice, et Moira fit signe à leurs escortes de reculer. « Des armes que nous portons uniquement au cas où quelqu’un viendrait perturber notre entrevue. »

HRP:

Ses ailes s'ouvrirent paresseusement avant de se refermer. Ses origines raciales le rendaient aussi sensible que les tentacules d'un Nautolan et il n'avait pas encore le sang froid de Maître Fisto. "A nous de faire changer les choses." murmura-t-il à son grand Maître en suivant son mouvement, les bras croisés dans ses manches pour camoufler ses griffes qui pouvaient intimider. Il pensa également à réduire considérablement sa présence en serrant ses ailes et ses rectrices au maximum. Un coup d'oeil vers Plume suffit pour que le Capitaine s'éloigne sans rechigner. "Et vos sabres laser ? Je sais que les Jedis sont dangereux !" pépia le Nanitae.

« N’importe qui peut être dangereux d’une manière ou d’une autre. C’est l’intention qui fait la différence. Nous venons avec des intentions pacifiques et ne comptons pas utiliser nos sabres laser contre vous. » Elle sentait leur scepticisme même sans voir leur expression. « On nous a prévenus que le Sénat enverrait des langues d’argent pour nous amadouer… et qu’il emploierait la manière forte après votre échec. » Evidemment. « Il est vrai que nous sommes venus négocier, mais la menace de recourir à la manière forte est un fantôme agité pour nous discréditer. »

Langue d'argent s'appliquait souvent à Maître Kenobi, Cholena serait heureux d'en mériter le titre. Mais il ne sonnait pas comme un compliment. S'ils avaient été seuls, il aurait demandé à Maître Moïra s'ils n'auraient pas dû se défaire de leurs sabres pour faire bonne figure. Il était cependant préférable d'afficher un front uni. "La planète Cooki est éloignée du coeur de la République et n'appartient pas au Sénat galactique. Nous n'avons donc aucune autorité pour vous menacer, Votre Grâce. Mais nous vous conjurons d'écouter notre requête car si les Séparatistes construisent leur usine sur votre territoire, des milliers de vie sont en jeu."

Certains grommelèrent, mais le porte-parole de la délégation se radoucit quelque peu. « Asseyez-vous. » Moira obtempéra sans se formaliser de l'instruction abrupte. « Correct : les affaires du coeur de la République ne nous concernent pas. Pourquoi devrais-je me soucier de ses habitants quand on m’offre de quoi améliorer notre vie ? » Parce qu’acheter quoi que ce soit au prix d’une vie est criminel. « Les affaires du coeur de la République ne vous concernent pas encore. Construire cette usine rapprocherait le conflit de votre peuple. Vous ne pourrez pas garantir qu’il ne sera pas pris entre deux feux, même si vous souhaitez rester neutres. »

"Les feux républicains menés par les Jedis." rétorqua automatiquement le délégué nanitae. "Les Séparatistes nous ont promis leur protection. Si la guerre devait venir, ce serait par la seule entreprise de l'armée des clones. Que vous menez, aux dernières nouvelles, Maîtres Jedis." Cholena s'était également assis et ses plumes frémirent une nouvelle fois à l'attaque féroce du politicien. Seul son intense entraînement pour maîtriser son hypersensibilité aux émotions lui évita de choir de son siège. "Votre Grâce, les Jedis sont des Gardiens de la paix. Votre sécurité est au coeur de nos préoccupations."

En surface, Moira ne réagit pas. Mais intérieurement, l’hypocrisie du porte-parole l’écœurait. Elle passa outre cette réaction instinctive et réagit toujours aussi calmement. « Contre qui avez-vous donc besoin de protection ? La République ? La République n’est pas en conflit avec vous et ne désire pas non plus l’être. Et ce n’est pas la République qui exporte cette guerre regrettable dans des systèmes neutres. Donc, si ce n’est pas contre la République que vous devez être protégés, contre qui les Séparatistes vous protégeront-ils ? Eux-mêmes ? Si vous leur donnez une usine dont eux tireront profit ? Voilà qui ressemble fort à de la menace… »

Les Nanitae s'agitèrent entre eux, parlant trop bas même pour leurs capteurs auditifs. Cholena coula un regard discret vers son grand Maître qui avait su trouver la faille dans le raisonnement du porte-parole. Ce dernier fit taire ses compatriotes et les fusilla du regard. "Nous sommes dans la Bordure Extérieure, pas dans votre Core bien gardé, Maître Moïra. Notre planète attise les convoitises et nous sommes vulnérables face à la famille Hutt ou au cartel des épices des Pikes." Une autre Nanitae ajouta sombrement : "Nous avons vraiment besoin de cette protection." Sa détresse était palpable. "Maître ?" appela mentalement le Chevalier.

« Je suis moi-même originaire de la Bordure, je comprends votre détresse. » Elle marqua une pause, tant pour préparer le terrain pour la suite que pour répondre à l’appel télépathique. « Oui ? » Elle reprit la parole tout en écoutant la réponse de Cholena. « Les Séparatistes vous offrent donc d’utiliser les robots que vous-mêmes aurez construits pour vous protéger… En quoi avez-vous besoin d’eux ? Qu’est-ce qui vous empêche de construire ces robots et de les utiliser pour vous protéger vous-mêmes plutôt que de dépendre d’individus dont la préoccupation majeure est une guerre à des années lumière d’ici ? »

"Nous n'avons pas la main d'oeuvre pour construire ces robots. Par contre, nous avons la place et les ressources. Notre loi interdit aux autres organismes vivants de s'établir sur Cooki." Le délégué continua sur la distinction que leur loi faisait pour les droïdes. Cholena trouvait cette loi xénophobe mais elle semblait nécessaire pour la survie des Nanitae. "Maître Moïra. Nous ne pouvons pas promettre une aide de la République, n'est-ce pas ? Ni des Jedis... Je sens pourtant que la détresse des Nanitae est réelle." Sa spécialité était justement d'utiliser son hypersensibilité pour détecter le mensonge... sans s'en laisser submerger.

« Je sais qu’elle l’est… » Elle n’avait pas besoin d’hypersensibilité pour cela : son expérience personnelle suffisait. Elle tira de la poche intérieure de sa robe un holodisque. « Je suis sûre que nous parviendrons à trouver une solution à votre problème. Le Sénat nous a chargé de vous transmettre ce message. » Le message en question se révéla décevant et creux, promettant des généralités sans offrir du concret. Il laissa les Nanitae prévisiblement sceptiques et Moira ne put leur donner tort. Elles annoncèrent qu’elles allaient délibérer et reprendraient les négociations plus tard. Sur le chemin du retour vers leur vaisseau, Moira fulminait.

"Maître, il n'y a pas de colère, juste la Force." lui rappela Cholena d'un air taquin. "Nous devons examiner ce que vous pouvons leur offrir. Le Sénat nous a laissé carte-blanche sur l'affaire." Il se souvenait des mots de Maître Windu avant leur départ : ils représentaient la confiance du Sénat en la diplomatie des Jedis et leur échec jetterait le discrédit sur l'ensemble de l'Ordre en ces temps troublés. "Nous ne pouvons promettre ni de la main d'oeuvre ni une aide humanitaire à cause de leur loi." Le Chevalier entortilla un cheveu autour de son doigt alors qu'ils rentraient dans le vaisseau. Un clone se gratta la gorge.

« Et mon exaspération est d’une force peu commune », répliqua-t-elle. Elle se reprit toutefois, consciente qu’elle devait montrer l’exemple. « Navrée de te décevoir Aisling, mais c’est nous et non les Séparatistes qui offrons du vent. Le Sénat s’attend à ce que ses bons sentiments suffisent à un peuple qui vit dans la crainte constante des raids de pillard en tous genres. » Un bruit attira son attention et elle se tourna vers le clone qui en était la source : « Oui, Tech ? »

Le clone avait beau être un vétéran du 317e régiment, il semblait toujours être intimidé par l'idée de parler aux Jedis. Plume lui tapota l'épaule avec un sourire encourageant. "Nous t'écoutons, Tech." ajouta doucement Cholena pour le détendre. Il connaissait bien ce prétendu clone "défectueux" au cerveau sur-développé mais aux capacités physiques limitées. S'il avait une idée, il était intéressé. "Voilà, Commandant, je me demandais si on ne pouvait pas leur laisser accepter l'offre des Séparatistes... et rendre les droïdes inoffensifs. Nous n'avons rien à leur offrir si ce n'est de maintenir leur neutralité."