Nano. RolePlay

Rappel du premier message :



Offrir une cuisine variée et de qualité sur une île isolée avec neuf mois par an de grisaille, mission impossible ? Quiconque vous répond que oui est défaitiste, ou n’est en tout cas pas Eibhlín : l’agriculture locale ainsi que la pêche dans les eaux autour de l’île lui fournissait des produits frais en abondance et le ferry mensuel apportait les produits introuvables sur Cuagach. Les résidents, permanents ou non, de l’hôtel n’avaient donc pas à se plaindre de la qualité de la nourriture et deux résidents en particulier jouissaient d’un régime bien supérieur à celui de leurs semblables : les deux main coon qui avaient élu domicile dans l’établissement en même temps que leur maîtresse. Assez peu de chats se font préparer leurs repas par une cuisinière tous les jours (cuisinière improvisée, mais néanmoins plus que correcte).

À l’heure habituelle, Eibhlín monta donc vers la chambre de ladite maîtresse et de ses chats pour apporter la pâtée qui n’en avait de pâteux que le nom : cabillaud fumé et crevettes, s’il vous plaît, rien que ça ! Routine oblige, la dame s’attendait probablement à son arrivée, mais Eibhlín frappa toutefois à la porte de la chambre plutôt que d’entrer directement.

Eibhlín avait d'excellents réflexes pour étudier les langues. Même si le gaélique n'était pas aisé à appréhender, Faélàn se doutait que la jeune femme ne mettrait pas si longtemps à l'acquérir ; elle avait déjà fait d'énormes progrès. Dieu ! Qu'elle se sentirait alors seule, quand les leçons se termineraient !

La vieille femme se secoua mentalement, jetant aux orties ces pensées dignes d'une mémé grabataire. Il lui resterait toujours les jeux de mots pour faire tourner en bourrique son élève... héhéhéhé...

Son amusement se répandit jusqu'à ses lèvres. Elle applaudit de bon coeur. "Tu t'en sors très bien !"

La la la la la la laaaaa ! ♪

Swann elle a entendu une chanson là-haut, donc elle monte dans le plafond pour faire de l'essoration. Elle veut chanter avec la chanson elle aussi ! Sauf que... maintenant, c'est tout silencieux ! Swann tourne en rond jusqu'à ce qu'elle trouve la bonne pièce.

Oh ! Bonjour Mamie Félan ! Bonjour Eibhlin !

Elle est toute contente, Swann, sauf qu'elle a oublié qu'elle doit parler différemment pour les vivants. Son entrée ne provoque donc qu'un petit courant d'air.

Eibhlín sourit sans retenue au compliment de son aînée : « Merci ! » Un courant d’air lui signala la présence d’un nouveau visiteur (car il venait du mauvais côté pour être causé par la fenêtre ouverte). « Swann ! Tu viens nous tenir compagnie ? » Le gaélique volait à la trape pour le moment, puisqu'Eibhlín n’avait aucune idée si la nouvelle arrivante le comprenait.

Sûre qu'on l'a entendue, Swann continue sur sa lancée : Ouiii ! Moi aussi je veux écouter la musique ! Et chanter !!

Le courant d'air ébouriffa le pelage des chats qui fixèrent un point avant de se remettre à leurs toilettes avec un flegme qui faisait toujours sourire Faélàn. Une autre chose qui l'attendrissait était ce fantôme qui venait de les rejoindre. "Nous ne t'entendons pas, ma petite Swann."

Oh ! Swann cligne deux fois des yeux en fronçant les sourcils et répond avec une petite voix. J’ai oublié. On peut quand même chanter la musique ?

Soit Swann avait décidé de se mettre au mime, soit il y avait un couac. Couac bientôt rectifié par l’intervention de la Dame. « Eh bien, votre mari déplace les foules on dirait », rit Eibhlín à l’intention de son aînée. « Je n’aurais rien contre écouter la chanson une deuxième fois. » Sans intervention d’un farceur de mauvais goût cette fois, de préférence.

"Pàdraic faisait sonner sa harpe et sa voix avec l'émotion de son coeur, évidemment qu'il déplace les foules." rétorqua Faélàn sans cacher son adoration, et la légère tristesse qui l'accompagnait dorénavant. "Et ma petite Swann, j'ai hâte de d'entendre de trémousser au rythme des loups." Elle sourit plus largement en remettant en route le disque.

Swann elle a pas compris tous les mots de la conversation mais la fin, elle a bien entendu. Elle pousse un petit cri de joie. Moi je sais faire le loup moi aussi ! Je peux faire le loup dans la chanson ? Ses grands yeux suppliants rebondissent entre Faélàn et Eibhlin.

Eibhlín n’avait rencontré le mari de la Dame qu’à quelques occasions, du temps où elle ne résidait pas en permanence sur l’île. Mais elle n’avait pas eu besoin de plus pour voir qu’il s’agissait d’un couple soudé et aimant, même après des décennies de mariage. Elle les avait un peu enviés à l’époque, même si elle n’enviait désormais pas son deuil à la Dame. Mais retour à des choses plus joyeuses : « Ah, ça tombe bien, Swann : je fais un très mauvais loup. » Elle illustra immédiatement ses propos à l’aide d’un hurlement tout sauf convainquant.

Faélàn rit de bon coeur devant leur enthousiasme qui l'éloignait de la triste réalité où elle ne pouvait entendre la musique de Pàdraic plus que sur un vinyle. "J'ai hâte de t'entendre faire le loup, ma petite Swann, car Eibhlín hurle le loup comme elle parle le gaélique." Ses yeux pétillants se posèrent gentiment sur son élève pour adoucir sa moquerie. Puis la Dame laissa aux orties les convenances pour laisser s'exprimer le Lutin : "A mon tour !" Son hurlement dénotait, lui, d'une certaine habitude en la matière.

Swann rit aux éclats, ravie, devant les hurlements de ses deux amies et commence à hurler aussi avec enthousiasme. Ce qui est bien d’être un fantôme, c’est qu’elle a pas besoin de reprendre sa respiration et Swann, elle en profite à fond ! C’est sans doute le plus long hurlement de loup qu’on a jamais entendu ! Sauf que ça ne plait pas beaucoup à quelqu’un… qui n'hésite pas à pousser un miaulement sonore pour protester.

Eibhlín ne pensait pas avoir déjà vu la Dame aussi… fofolle, faute d’un meilleur mot. Elle rit aux éclats au spectacle que son aînée et sa cadette lui offraient et rit de plus belle quand un miaulement de protestation retentit. Elle se tourna vers l’auteur du bruit : « Je pense que tu imites aussi bien le loup que moi, désolée. »

Faélàn cessa ses friponneries pour couler un regard attendri sur ses chats. Satine les fixait avec un air de majesté heurtée tandis que Laiwann s'était redressé avec son immense crinière toute gonflée. "Oh mes chéris..." s'amusa la vieille femme en retenant un gloussement derrière sa main. Elle se tourna vers ses invitées. "Très chères ! Notre concert indispose la Duchesse et son Duc. Essayons d'y remédier, voulez-vous ?" Elle remit le vinyle en route et s'assit près de ses chats qui vinrent s'installer l'une sur ses genoux, l'autre contre elle. Sa voix douce s'éleva en harmonie parfaite avec celle de Pàdraic.

Swann a les yeux tout grand ouverts alors qu'elle regarde Faélàn chanter. Elle trouve ça tellement beau qu'elle a même plus envie de chanter aussi. Elle reste juste là et flotte au rythme de la musique, des étoiles dans les yeux et la bouche ouverte d'émerveillement.

Ce sont donc deux spectatrices admiratives qui suivirent les harmonies de la Dame et son défunt mari. À nouveau, le corps d’Eibhlín se mit à suivre la musique de son propre chef et elle se mit à fredonner, doucement pour ne pas gâcher le chant. Ici et là, elle saisissait des mots, même si une bonne partie des paroles se fondait toujours dans une bouillie de sons ravissants mais incompréhensibles.

Bien malgré elle, Faélàn oublia ses invitées pour se perdre dans ses souvenirs. Elle se souvenait clairement des nombreuses occasions où elle avait ainsi accompagné la voix réelle de Pàdraic et ses yeux restèrent rivés dans le vague même quand elle cessa de chanter. Ils avaient partagé tellement d'heureuses, et de moins bonnes, années ensemble. Il lui paraissait toujours étrange qu'il ne soit plus là.

Swann, elle a pas trop remarqué l'humeur mélancolique de Faélan. Tout ce qu'elle a vu c'est que la musique elle est arrêtée et c'est trop triste parce que c'était tellement waouh ! et ooooh ! et tling ! Alors Swann elle va jusqu'à la boite qui fait la musique et demande avec excitation : Encore, mamie Félan ! Encore !

Eibhlín, pour sa part, avait remarqué la nostalgie de son aînée, mais n’était pas sûre de savoir comment y réagir. Elle aimait beaucoup la Dame, s’était rapprochée d’elle au fil de leurs échanges, qu’il s’agisse de leurs leçons ou de simples conversations… mais elle n’était pas sûre d’être assez proche d’elle pour les pensées et émotions qui trottaient probablement dans la tête de la doyenne. Elle fut donc ravie que Swann se charge de rappeler tout le monde dans l’instant présent.

La voix enthousiaste de Swann la ramena au présent et elle se secoua en mettant les mains sur les hanches. "Voyons, Eibhlín ! Il ne faut pas laisser cette vieille chose que je suis se perdre dans ses souvenirs ! Heureusement que Swann veille au grain !" Son sourire s'agrandit d'espièglerie alors qu'elle fixait la jeune femme. "Je ne remettrais la musique que si Eibhlín chante cette fois !"

Swann elle adore quand les jolis gens lui sourient, ça lui fait tout chaud au corps et ça la fait sourire très grand aussi ! Et puis elle tape des mains avec enthousiasme quand mamie Félan dit que Eibhlin doit chanter. Elle aussi elle veut entendre Eibhlin chanter ! Oui oui oui !

Ravie de voir la Dame retrouver son habituelle humeur taquine, Eibhlín sourit… puis prit un air bien plus sceptique en entendant l’exigence des deux autres. Elle fit mine de regarder par la fenêtre : « Euh… vous êtes sûres de vouloir risquer de faire pleuvoir en une de ces rares journées ensoleillées ? » Bon, elle exagérait un peu, mais elle était loin d’être une bonne chanteuse.

"On ne réveille pas une Fir Darrig de sa torpeur sans en subir les conséquences, Eibhlín." La voix de la vieille femme tressautait d'une clochette amusée et ses yeux pétillaient de joie taquine. "Et puis, un peu plus de pluie ne va même pas se remarquer sur cette île."

« Les dangers de l’Irlande… J’aurais dû rester à Oxford », se désespéra Eibhlín de manière assez peu convaincante, aussi piètre actrice que chanteuse. « Quoique, si ça se trouve, même là je ne serais pas à l’abri des fées et autres elfes. »

"La vieille magie n'a pas de limite..." susurra la vieille femme avec cette malice de fée qui lui venait si naturellement qu'elle semblait innée. Elle claqua soudainement des mains. "Maintenant, ma chère Eibhlín, un chant ou un sort !"