Nano. RolePlay

Je profite que ma femme soit absente en cette journée, que Daisuke soit à la crèche pour m’offrir une petite après-midi jeu vidéo. Ça fait un petit moment que je joue à un jeu en mode RPG où je suis un découpeur de monstre ultra réputé au sein de ma guilde. Je n’ai pas eu le temps de me poser avec les obligations familiales mais enfin, je vais pouvoir reprendre ! Je m’étais arrêté sur le choix d’une nouvelle arme car j’avais cassé la dernière sur un boss assez coriace. La VR en place sur le visage, c’est parti ! Je retourne dans cet univers un peu moyenâgeux où m’attend toute une communauté et des quêtes à effectuer pour débloquer des niveaux, quand il n’y a pas des attaques surprises de monstres. Le jeu parait super réel avec des alarmes à chaque fois que des monstres s’approchent de la ville.

Dilemme… Je suis devant un sacré dilemme. Je suis devant un étal d’armes en tout genre. J’ai cassé mon katana et comment dire, que pour aller découper du monstre, c’est bien pratique un katana. J’hésite entre deux modèles et le vendeur a l’air plutôt sûr de lui quand il me dit de prendre le sabre qui se trouve sur ma gauche. C’est vrai qu’il est plutôt sympathique – le fourreau est blanc et or. J’aime beaucoup et j’hésite car l’autre à ma droite est bleu et gris. Des couleurs que j’affectionne également. Pour une raison que j’ignore jusqu’alors, le vendeur me vante les mérites du katana or et blanc. Il me dit que c’est le meilleur sabre, que c’est un katana vraiment haut de gamme qui coupe même une feuille de papier en un éclair. Je regarde rapide les stats, peut mieux faire quand même. Mais, je me laisse convaincre par ses arguments car il me faut quelque chose de qualité.

Je finis alors par acheter le sabre blanc et or contre une modique somme d’argent, ce que je ne comprends pas à nouveau, tout de suite. Le vendeur semble très ravi de se débarrasser de ce sabre et je vais l’apprendre à mes dépens quelques heures plus tard. Ravi de mon achat, je rentre à ma guilde pour tout de suite m’entrainer avec. Les monstres n’attendent pas que vous soyez prêts, ils surgissent à n’importe quel moment et, surtout au moment où vous vous y attendez le moins. Donc toujours être prêt et sur ses gardes. L’entrainement commence tranquillement, et d’un seul coup le sabre se met à parler !

« Ho le blondinet ! Tu crois quand même que tu vas te servir de moi comme ça hein ? »

« Q... Qui me parle ??? »

« C'est moi ducon, celui que tu as dans les mains. »

« Hein que quoi ?? Un sabre qui parle ?? Non, non impossible, j’ai dû m’endormir sans même m’en rendre compte… »

« Ha mais c’est qu’il est drôle et débile le blondinet en plus. »

Et comme si de rien n’était, une forme sortit du katana par la suite. C’était un homme tout en muscle, comme moi, avec de multiples cicatrices sur le corps, une queue, des oreilles de lion, et il était… nu. Ça ne le dérangeait pas à priori puisqu’il a commencé à me tourner autour en regardant qui était son actuel propriétaire puis il me tira les joues en rigolant d’une voix forte et désagréable.

« Tu t’es bien fais rouler dans la farine imbécile ! Le vendeur a certainement oublié de te dire que ce sabre était maudit et qu’il n’en faisait qu’à sa tête. Il va falloir me mériter si tu veux m’utiliser. Je ne donne pas mon pouvoir à n’importe qui. »

« Et c’est un sabre qui me dit ça. C’est moi ton maitre, toi t’as rien à dire je te signale. D’ailleurs, si tu continues, je te casse direct. »

« Ha tu ferais vraiment ça ? C’est bête mon petit mais… »

Avec la lame du sabre, il me coupa légèrement le doigt et une sorte de lien invisible se fit entre nous deux. La sale petite vermine avait osé me faire le coup du lien indestructible qui relie une personne à une autre.

« Et voilà, tu ne peux pas me casser sinon tu meures aussi. Pacte du lien indestructible mise en place. C’est bête pour toi blondinet ! Au pire, tu deviendras fou huhu. »

Pourquoi cette saleté de vendeur ne m’a pas prévenu ?! C’est clair que je n’aurais jamais pris un sabre maudit ! J’ai entendu des rumeurs sur certains sabres comme quoi s’ils n’arrivaient pas à défaire le lien indestructible, les porteurs devenaient fous à cause de leurs comportements. MAUDIT VENDEUR JE VAIS ME LE FAIRE ! Je n’ai pas le temps de tergiverser qu’une alarme retentit dans la ville. Les monstres sont de retour et que je le veuille ou non, il va falloir aller à se battre. Il a intérêt à m’aider celui-là ! L’âme qui habite dans ce sabre me regarde avec un air de défi, alors que je suis en train de pester.

« Rentre là-dedans machin. Je dois aller buter ces monstres illico presto. »

« Attends, tu m’appelles Machin et tu espères que je vais obéir à tes ordres le blond ? Tu te fourres grave le doigt dans l’œil là. Je m’appelle Gulliver. »

« Attends… Gulliver comme les contes pour enfant là ? Ho mais sérieux ! Quel nom pourri, on aurait pu te donner un nom plus stylé quand même… »

« La ferme le morveux, ça me donne encore moins envie de t’aider. »

« Allez, fais pas ta mijaurée, sérieux, on a pas le temps là ! Ils vont arriver ici d’une minute à l’autre. »

« Et alors. Tu m’as insulté, je ne vois pas pourquoi je t’aiderais. Tu n’as qu’à l’utiliser sans ma force pff. »

Le voilà qu’il se marre ; oui tiens, c’est ce que je vais faire. Je prends le katana et cours sans plus tarder pour aller découper ces monstres en deux. Je suis le plus réputé des découpeurs de monstres et quand je m’attaque à l’un d’eux, fait étrange, je ne découpe rien. Pire ! J’ai l’impression que sans la présence de l’âme de ce sabre, celui-ci est juste un sabre émoussé et ordinaire. Raaaah ! Situation un peu critique, ce katana ne coupe rien du tout sans son âme et si je continue comme ça, je vais perdre une jambe avant l’heure. Je prends quelques blessures de la part de ces monstres et je fuis dans une petite clairière qu’il y a non loin de là, le temps de trouver une autre stratégie. Or, je n’ai jamais fui de ma vie… La honte suprême ! L’homme-lion me rejoint et se met à rire.

« J’ai oublié de te dire que tu pouvais tenter quoique ce soit, mais si je ne donne pas mon pouvoir, ce sabre ne fonctionnera pas. »

« Tu n’es clairement pas gentil… Prête moi ta force s’il te plait. »

« Huuum je vais y réfléchir… »

« Vas-y ! Que faut-il que je fasse pour que tu m’aides à buter ces monstres ? »

« Je veux que tu t’excuses, face contre terre pendant 30 secondes et que tu me brosses la queue. Ensuite peut-être que je te laisserais utiliser mon pouvoir. »

« Mais t’es sérieux ?? »

« Allez hop hop hop, t’as dit que y’avait pas le temps non ? Soit, tu le fais, soit je ne te prête pas ma force et tant pis, tu finiras avec une jambe en moins et la risée de toute ta guilde. »

Tss… en colère et frustré, j’ai dû me résigner à faire ce qu’il me demandait. Rigolant lorsque j’ai mis ma face dans la boue pour m’excuser platement et après multiples brossages sur sa queue qui m’ont fait perdre un temps si précieux, il a fini par me prêter sa force et j’ai pu montrer tous mes talents. Ce sabre est exceptionnel, il découpe vraiment bien mais quel casse pied par contre l’âme qui y est reliée.

Voilà que je suis relié à vie avec un casse pied qui me confère sa force, uniquement quand il a envie. J’ai même le droit à du chantage à chaque fois que je dois l’utiliser… Je n’ai pas très envie de mourir alors je n’ai pas le choix. Cet imbécile m’a même ordonné après cet incident, que l’on fasse une cérémonie de mariage parce qu’en soit, on est mariés à cause de ce pacte non consenti.

Marié dans le jeu à un casse pied, marié dans la vie réelle à une casse pied… Génial. Je n’ai pas entendu la porte s’ouvrir, ma femme est rentrée et se marre comme une dinde en m’écoutant parler tout seul. Je crois elle m’a filmé la garce.