Nano. RolePlay

Au soleil dans le ciel, il ferait nuit dans quelques heures et Xaerys n'avait toujours pas atteint le village "pas très loin" où il espérait se reposer. Il aurait très pu tracer sa route d'une traite s'il n'y avait pas cette douleur familière logée dans son cœur : une personne non loin était blessée et l'ignorer lui faisait mal.

L'elfe ruminait contre lui-même qu'il avait froid, faim et ne voulait en aucun cas passer la nuit à la belle étoile mais ses pas -ces traitres !- bifurquaient peu à peu de sa route initiale malgré lui. Xae soupira mais luttait toujours, même quand il avait clairement quitté le chemin menant au village pour se perdre dans la forêt.

Entre chien et loup, l'elfe avait posé les bases d'un campement de fortune. Il alluma le feu de manière on ne pouvait plus traditionnelle. Alors que les premières flammes léchaient le bois, une violence douleur à la poitrine lui fit lâcher le briquet. Une quinte de toux le mit à genoux. Regarda sa paume, il fronça les sourcils, et parla à voix haute, comme si cela pouvait le convaincre.

Ca passera.

Il essuya le sang sur sa main, et rangea le briquet.

Le roux avait cessé de se mentir sur ses intentions à la vue du feu entre les arbres. La source était toute proche, à coup sûr l'elfe brun qu'il voyait de dos. Resserrant son sac en bandoulière pour se donner du courage, Xaerys s'avança sans chercher à être plus discret que ça dans le cercle de lumière. "Uhm... bonsoir ?" tenta-t-il avec un sourire avenant.

Or et émeraude, les yeux de l'elfe brun se relevèrent. Légèrement écarquillés, il s'était laissé surprendre. À la lumière du feu, il détailla celui qui lui faisait face. Sa peau sombre, mais pas si sombre que ça, ses cheveux flamboyants, et plus brillante encore, l'étoile à son front. Il lui rendit un sourire pétillant.

Joli soleil.

Xaerys s'étonna un moment de la salutation, beaucoup trop proche de son nom ancien. Une coïncidence ? "Puis-je me joindre à vous messire ?" demanda-t-il dans un premier temps. Ses parents lui avaient bien enseigné la courtoisie et Xae ne désirait vraiment pas être chassé sitôt son blessé trouvé. De toute façon, il ne ferait que le suivre jusqu'à sa guérison, pas comme s'il avait le choix.

Mess... Son rire se déclencha avant qu'il ait terminé de prononcer le mot. Il essuya une larme au coin de son œil. Je n'suis rien qui y ressemble !

Ses yeux envisageaient son interlocuteur avec une gaieté qui ne tarissait pas.

Tu es bienvenu. Il se saisit de la rapière à son côté, libérant la place sur le tronc couché qui lui servait de siège.

Tu as mangé ? Tu as faim ? Un temps d'arrêt, comme s'il s'était rendu compte avoir posé deux fois la même question. Il le regarda, indiquant que ses pensées avaient continué leur court. ... Tu as froid ?

Directement le tutoiement ? Sa familiarité continua de me perturber mais après tout, nous étions deux elfes perdus au milieu des bois à la tombée de la nuit. Enfin, si je peux l'accepter, je pense que j'aurais du mal à en faire de même... c'était beaucoup trop abrupte pour moi ! Au moins il avait un rire plaisant. "Merci et... non, je n'ai pas encore pu me poser. J'avais espéré trouver une auberge avant la tombée du jour." Le tronc d'arbre était assez long pour nous permettre de ne pas se gêner mais pas au point de s'éviter. "Ma nature frileuse est si visible que ça ?" lui souriais-je en resserrant les pans de ma cape.

Un sourire. ... Oui.

Il se leva, et commença à s'éloigner. Il s'enfonçait déjà dans la forêt, quand il se retourna. Il parla vite, une réalisation soudaine. J'ai posé un collet. Je ne suis pas un grand chasseur, mais avec de la chance ça suffira pour nous deux. Il désigna la place laissée libre avec un sourire prévenant. Profite du feu.

"Heu... faîtes donc, merci." J'ai un peu décontenancé par son attitude, comme s'il avait enchaîné les idées à la suite. "N'hésitez pas à demander si vous avez besoin d'aide" rajoutais-je en sachant que je n'aurais aucun mal à suivre sa piste dans les bois. Mieux valait attendre le moment plus propice aux confidences du repas pour parler de sa blessure.

L'œil doré brillait de malice. Ca ira.

Aux yeux de l'elfe, il disparut rapidement dans le sous-bois. Un peu de temps passa avant qu'il ne revienne, un sourire fier et épanoui sur le visage. Il tenait un lapereau dans une main, et deux oiseaux dans l'autre.

Je m'étais rapproché du feu, attiré par sa chaleur et me berçant dans l'illusion que j'étais devant la cheminé d'une taverne accueillante.... un ululement au-dessus de ma tête brisa complètement mon rêve éveillé. "Je ne pense pas que nous ayons la même définition de pas un grand chasseur messi- heu..." J'eus un blanc, comment s'appelait-il ?

Un collet et un peu de chance. Le brun sourit, ne minimisant en rien sa prise. Samin. Son sourire s'élargit. Enchanté. Il esquissa un geste avant de se rappeler qu'il avait les mains prises. Alors il s'installa à côté de son nouvel acolyte, les oiseaux posés près du feu. Il sortit un petit couteau de ses fontes et commença à entailler la chair du lapin, mais interrompit son geste à peine entamé. Il se tourna vivement vers le roux. Tu sais dépecer ? Vider ? Plumer peut-être ?

"Xaerys" répondis-je à mon tour. La feu me sembla plus agréable quand il revint vers moi, c'est que j'aime rarement être seul (et encore moins de nuit perdu en pleine forêt). "Et bien... uhm..." hésitais-je devant les oiseaux morts, mal à l'aise. "Plumer oui, je peux faire. Je crains ne pas être assez manuel pour me lancer dans le dépeçage sans faire de dégât." Techniquement, j'avais assez de connaissances en médecine sur les animaux pour savoir comment m'y prendre mais... je guérissais mes patients, je ne les vidais pas. D'ailleurs, il faudrait bien que je trouve comment aborder le sujet de sa blessure.

C'est déjà bien. Avenant, l'elfe se pencha pour prendre dans sa main l'une de petites créatures à plumes, qu'il tendit vers son compagnon. Puis son expression changea en voyant la sienne, constatant son malaise. Mais tu n'es obligé à rien. L'oiseau, contrairement au lapin, ne présentait aucune blessure évidente.

"J'aime encore moins ne rien faire et profiter de la bienveillance des gens" expliquais-je. Oh d'ailleurs, ça me donnait une idée ! "Mais j'ai d'autres talents sinon, je suis un bon soigneur !" Voilà, la perche était tendu en espérant qu'il la saisisse.

Soigner ? Je ne vois pas l'intérêt de soigner notre repas... Un instant de réflexion, alors que les yeux dissemblables s'abaissaient sur la proie entre ses mains. Surtout... qu'ils sont déjà morts. L'on pouvait presque entendre une once de regret dans sa voix. Laissant l'oiseau dans les mains du roux, il reprit néanmoins son couteau, et poursuivit sa tâche sans plus de cérémonie. Les entrailles vidées, la peau du lapin se retrouva bientôt retournée, mettant sa chair à nu.

J'en restais coi. Pendant un instant, sa réponse m'avait tellement démuni que je restais à retirer les plumes mécaniquement une à une sans trop comment réaborder le sujet. La bienséance me demanderait d'ailleurs de ne pas y revenir mais la douleur qui vrillait mon corps devenait de plus en plus insupportable et j'espérais égoïstement passer une bonne nuit. "Je parlez de vous en vérité. Je sais que vous êtes blessé." Par mes ancêtres, qu'est-ce qu'il m'avait pris d'avoir été aussi direct ?? Pourvu qu'il ne m'en veuille pas !

Le lapin tournait sur une broche au dessus du feu. L'elfe brun ne resta pas oisif, formant bientôt un petit tas de plumes à ses pieds. Son visage ne montrait rien mais il fut un moment aussi silencieux que le roux. N'y tenant plus, sa bouche se tordit en un rictus, juste avant que le soigneur ne parle. Le visage déformé par une souffrance qu'il n'arrivait plus à intérioriser, il se tourna vers lui.

C... omment...

Sa voix étranglée fit place à une quinte de toux, plus forte que les précédentes. Son sang maculait sa main, les plumes, la terre. Une mèche blanche retomba devant ses yeux. Il ne pouvait plus nier son état.

Les plumes volèrent quand je me précipitais vers Samin pour le rattraper, ou du moins lui apporter un soutient physique. "Vous allez bien ?" demandais-je bêtement. "Je suis désolé, j'aurais dû aborder le sujet plus tôt."

Il n'était pas vraiment tombé, mais les bras secourables étaient bienvenus. Cette quinte de toux l'avait vidé, il semblait au bout de ses forces. Il secoua la tête, vraisemblablement autant pour garder les idées claires que pour répondre à l'elfe. Il déglutit mais sa voix refusa de porter, laissant échapper une syllabe qui aurait tout aussi bien pu être un croassement. L'air misérable, il se pencha, la main épargnée par sa toux voulant atteindre ses affaires de voyage.

Je frottais son dos en cercles que j'espérais apaisants tout en me mortifiant de ne pas avoir été plus direct. J'aurais pu lui épargner cette douleur ! "Ne bougez plus, je vais vous aider" tentais-je de me rattraper en comprenant qu'il voulait atteindre son sac. Plus grand que lui, je pus l'attraper et le rapprocher. "Que cherchez-vous dedans ?"

Un mince filet de sang coulait à la commissure de ses lèvres. Les mains de l'elfe fouillèrent fébrilement dans son sac. Il toussa encore, crachant dans un épais mouchoir le sang qui stagnait dans sa bouche et ses bronches. Mais après cela, son visage se détendit, témoignant d'un grand soulagement. Il releva les yeux vers le roux. Il parla vite. Trop vite pour sa voix abîmée.

Comment as-tu su... ? Pourquoi t'excuser ? Ne t'excuse pas. Tu n'étais pas censé... Je pensais...

"Chuuuut" fis-je d'une voix douce en posant un doigt sur ses lèvres, qu'importe le sang sur ma peau (tant que je ne tâchais pas mes vêtements avec !) "Je vais vous demander de rester allongé sur le sol et de m'indiquer où vous avez mal. Et n'essayez pas de me cacher la vérité, vous aggraverez uniquement vos blessures." Je ne me voyais pas changer de ton, devenant plus autoritaire devant un patient réticent. Mais je ne pouvais pas le laisser dans cet état.

Nul sang ne souilla la peau du roux lorsqu'il vint au contact des lèvres brunes. Leur possesseur écarquilla les yeux, faisant silence aussi brusquement qu'avait commencé le flot de ses paroles. Ses lèvres closes osèrent un baiser sur les phalanges exposées avant qu'il ne s'éloigne légèrement. Son expression s'était muée en sourire, faisant briller ses yeux dissemblables d'une lueur espiègle.

Je te remercie mon bon prince, mais je suis capable de me soigner seul.

Le geste tendre me déstabilisa et je ne savais s'il jouait un jeu obscur ou était sincère dans... et bien.... ce qu'il faisait. "Sans vouloir me montrer insistant" - un peu si quand même - "vous ne seriez pas dans un tel état si vous saviez vraiment vous soigner. Je suis guérisseur et je suis venu votre rencontre pour vous venir en aide." S'il refusait mes soins, devrais-je l'assommer pour tout de même officier ? Ça serait un brin radical mais je ne souhaitais pas avoir mal également et le laisser souffrant était contraire mon éthique. .... un coup sur la nuque suffirait pour qu'il s'évanouisse ?