Rappel du premier message :


La ville de Voronej, chef-lieu de l'oblast du même nom, jonction entre Moscou, Rostov-sur-le-Don et l'Ukraine, célèbre pour son école militaire, est avant tout une ville. Une ville où grandissent de jeunes enfants, calmes parfois, turbulents le plus souvent.

Ainsi les parents de Maksim devaient composer avec ses premières rebellions ouvertes. Ce n'était pas parce qu'il n'avait pas eu de pielmeni au déjeuner qu'il était parti en courant, c'était… un tout. Il voulait prouver au monde qu'il existait et qu'il avait des désirs propres. Et quand les mots ne suffisaient pas, il réagissait à l'instinct plus que de raison.

Ignorant totalement volontairement les injonctions de ses parents comme "ne monte pas sur le muret", "ne cours sur le muret", "reviens avant de te faire mal", Max faisait donc tout l'inverse. C'était un garçon de sept ans assez turbulent après tout. Il était aussi assez myope et refusait de porter ses lunettes. La suite était simple à deviner : il a glissé et est tombé dans l'eau froide du fleuve.

Fort heureusement, il avait quelques notions de natation et parvenait à garder la tête hors de l'eau mais combien de temps ?

"Milicien pour être plus précis mais… J'ai dû me battre à l'étranger donc j'imagine que ça compte pareil. Vous parlez de Maksim ? Il doit d'abord à apprendre à écouter ce qu'on lui dit. Il ne sera jamais bon soldat s'il n'apprend pas à canaliser correctement son énergie. (à Maksim) Mais je suis sûr que tu as été très courageux, hein ?"
Maksim tourna la tête pour cacher son sourire et le fard sur ses joues.
"Vous n'en êtes qu'au début mais la vie de soldat n'est pas facile."

"C'est ce que me disent les vétérans. Beaucoup regrettent de ne pas avoir rejoint la Milice." il hausse les épaules. "Je verrais bien comment ça se passe. C'est comment la Milice ? Celle de ma petite ville ... il y avait des gens pas toujours recommandables d'après ce que racontent certains anciens. Mais personne ne dit rien, parce que les prêtres soutiennent la Milice et que tout le monde respectent les prêtres."

"Il y a peut-être un chouïa moins de morts et de surprises, peut-être, je ne saurais dire. C'est très routinier : on s'entraîne, on intervient, on arrête. Ça dépend de l'endroit. Il vaut mieux avoir de bons collègues car évidemment les citoyens ne regardent pas les miliciens d'un bon œil, vu que notre venue ne signifie que des ennuis pour les malfrats et les fauteurs de troubles."
Le grand-père avait un ton de voix paisible, acceptant totalement sa condition mais conscient que tout le monde ne peut pas y parvenir.

"Si jamais l'armée ne me convient plus tard. Je deviendrais certainement Milicien. C'est important de protéger les plus faibles." c'est sa conviction depuis tout petit. Sa taille et sa force n'ont jamais été une force d'oppression. En tout cas jamais envers les faibles. Seuls les vicieux, exploiteurs et autres gamins violent avaient eu affaire à lui. "Les démons ? C'est comment de combattre contre eux ?" demanda Fedor. Il a toujours été inquiet que sa force soit inutile contre ces derniers.

Le regard du grand-père glissa sur Maksim, indiquant clairement qu'en parler devant l'enfant le dérangeait. Ce dernier avait les yeux qui brillaient.
"Ce n'est pas un exploit ou un acte noble, c'est mon travail."

Une réponse peu satisfaisante, mais le regard vers Maks laisse à penser que le vieil homme ne veut pas en parler en présence de l'enfant. Fedor comprend, même si lui ne prend que rarement de gants avec les enfants. Sans doute qu'il a tort et que leur laisser leur innocence le plus longtemps possible est ce qu'il y a de mieux à faire. "Bien sûr." dit-il pour cesser la conversation sur ce sujet en particulier. ""Vous habitez loin ? demande-t-il ensuite. Parce que le froid commence à se frayer un chemin jusqu'à la moelle de ses os. Et il tremble malgré lui par moment.

"Nous sommes presque arrivés, encore deux pâtés de maisons et vous pourrez vous sécher.
- Fedor connait le stenka !
- Oh, impressionnant." répliqua Lev, le grand-père, avec un certain détachement.

"Dans les campagnes ce n'est pas rare de trouver beaucoup d'homme qui pratiquent." explique humblement Fedor. Il n'y a rien d'étonnant en fait. Par contre si on parler de ses capacités, il était plus compliqué de rester humble. Mais là n'était pas le sujet. "A quoi destinez vous l'enfant ?" demanda Fedor qui sentait avoir fait une bourde en parlant "d'une graine de soldat". Il semblerait que le vieil homme souhaite éloigner le petit de la violence. Ou alors il protège l'enfant et attend qu'il grandisse. Difficile à dire pour lui qui n'a pas d'expérience en la matière.

A quoi se destine-t-il ? C'était une bonne question. "Je veux aider les plus faibles. C'est tout. Sans doute qu'un jour je trouverais une jolie femme pour me marier et faire des enfants. Une femme simple comme moi."

Pour Maksim, le mariage était affaire ennuyeuse d'adultes. Il ne savait pas encore si ça l'intéressait.
"Je vous conseille de vous marier au plus tôt, dès que vous êtes sûr. Les remords sont plus faciles à vivre que les regrets, surtout à deux. Ah, nous y voilà."
Il désigna une charmante maison de petite bourgeoisie.

"J'en prends bonne note." dit Fedor avant de se tourner vers le plus jeune. "La Milice alors ? c'est bien. Mais n'oublie pas pourquoi tu veux exercer une telle activité. J'ai choisi l'armée par exemple mais j'aurais pu choisir une autre voie. Comme la médecine. Sauf que ma famille n'a pas d'argent." sourit Fedor qui avait choisi la voie la plus simple pour quelqu'un de sa condition. Frigorifié il avait accéléré le pas sans s'en rendre compte à la vue de la maison. Il ne se fend pas du moindre compliment, il veut juste trouver une cheminée et un feu.

"La médecine ? Je veux pas être médecin ! Il parait qu'on sort jamais ! Je veux un chien et un cheval ! Les médecins n'ont pas de chien, non ?
- Non, ils n'en ont pas souvent. Entrez donc, dit Lev en passant le pas de porte. Je vais vous présenter à mon fils et ma belle-fille. (à la cantonade) Andrei, nous avons un invité ! Monsieur… Comment déjà ?
- Fedor !"
Certes, mais encore ?

"Fedor Ianovitch Voliakov." dit simplement le grand homme à la recherche de la cheminée. "Je propose de se présenter les uns aux autres devant la cheminée." ajoute-t-il alors en frissonnant.

"Les médecins sont riches et peuvent avoir autant de chevaux et de chiens qu'ils le désirent." dit Fedor. "Mais c'est beaucoup d'étude et de livre à lire." Il s'était renseigné quand même. Avant de se résigner. La voie de la violence était la plus simple pour un homme de sa condition.

"Oh, la cheminée n'est pas allumée mais nous allons allumer le poêle et… Maksim, va chercher des serviettes sèches pour toi et monsieur Voliakov.
- D'accord, tout de suite !"
Maksim lâcha le manteau gentiment prêté par son sauveteur pour aller chercher les fameuses serviettes. Une femme à l'aspect doux et modeste apparut alors.
"Fedor Ianovitch, je vous présente Lyudmila Yakovlena Bounina. Je te présente le sauveur de notre fils. Il s'est jeté dans la rivière.
- Je vais vous faire couler un bain si vous voulez bien m'excuser."

Fedor reste souriant mais c'est un sourire crispé. Il récupère son manteau et l'enfile rapidement. C'est toujours mieux que rien. C'est toujours proche de l'écurie que le cheval s'emballe. Il comprend mieux cette expression maintenant.

"Bonjour." dit-il doucement en observant la petite famille. Et notamment la maman à l'apparence si simple et douce. "Je n'ai rien contre un bain chaud en effet." confirme l'homme frigorifié.

Maksim arriva avec les serviettes, des bonnes serviettes blanches moelleuses et sèches. Pendant ce temps-là, le vieil homme a mis en marche le poêle qui mettra quelques minutes à chauffer.
"Voilà, parfait. retirez vos chaussures et frictionnez-vous bien tous les deux.
- Oui, papy !"

Fedor ne se fait pas prier. Rapidement il est en petite tenue et se frictionne avec une serviette. Son corps d'athlète montre qu'il s'entraine, muscle et petites cicatrices dénote son entrainement militaire rude. "On est mieux là que dans la rivière hein ?" question rhétorique qu'il pose à Maksim.

"Oui !"
L'expérience n'avait pas du tout été agréable.
Lev essayait d'aider Maksim à se frictionner mais une fois que Max avait compris le principe, il s'appliqua à le faire tout seul, comme un grand. Il ne fut pas particulièrement impressionné par les abdos de l'étranger, ceux de son grand-père étaient similaires. Il se convainquit juste tout seul que plus tard, il devait gagner de semblables, surtout pour devenir milicien ou soldat.

Fedor termine rapidement d'éliminer toute trace d'eau sur son corps. Puis il se dore devant le poêle attendant avec ferveur que la chaleur se diffuse. En attendant il remet son manteau qui lui est sec. Récupère ses habits, mais il ne veut pas les tordre dans la pièce et répandre de l'eau au sol. Chez lui ça ne poserait pas de problèmes. Mais ici c'était différent.
"Vous avez une belle maison." constate le géant. Il n'a pas l'habitude d'aller dans des maisons de ce genre et son regard parcours le mobilier avec étonnement.

Le mobilier est en effet sobrement chic, bien entretenu.
"Merci, nous faisons de notre mieux pour assurer notre confort."
Par un fin sens de l'économie domestique et un patient travail de longue haleine, exploit inaccessible pour un adolescent seul.
"Vous en aurez une un jour, sans doute."
Lev fait le lien et va chercher une bassin pour essorer les vêtements qui pourront sécher devant le poêle pendant que leur invité prend un bain bien chaud.
"Je suis sec !" affirma Max.

Fedor se laisse entrainer dans un rêve où il aurait gagné une belle maison à la sueur de son front. Un endroit un peu comme ici. Simple, mais aussi chic à la fois. Il ne se voit pas dans une des grandes maisons de la bourgeoisie, même s'il n'en a jamais vu en fait. De toute façon les soldats ne gagnent pas assez d'argent pour ça. Et se marier avec une fille de bonne famille est totalement impossible. Quel père accepterait d'offrir la main de sa fille a un roturier aux faibles économies. A moins qu'il gagne sa part de gloire à la guerre. C'est une possibilité. En tout cas il est perdu dans ses pensées pour le moment.

Maksim n'avait pas dit son dernier mot !
"Eh ! Fedor, tu veux bien me montrer comment combattre mes ennemis ? Je veux devenir le plus fort !"

"Moi je veux bien. Mais il faut que tes parents soient d'accord. Tu pourrais avoir des bleus après l'entrainement." répondit Fedor. En fait il pourrait très bien l'entrainer purement sur la technique. Mais un guerrier se doit de connaitre la douleur et sa propre résistance à celle-ci. Le tout est de doser ça pour ne pas faire peur au petit. Il est jeune. Normalement l'adrénaline permet de passer outre et les enfants ne s'aperçoivent que plus tard qu'ils se sont fait mal. Il se souvient qu'il se demandait où il avait bien prendre les coups associés aux bleus qu'il découvrait en se lavant.

"Oh oui ! Tu vas me montrer alors ! Des bleus ? J'en ai déjà plein ! s'exclama Maksim, oubliant complètement les a priori de son père (et sa mère). Combien de temps tu restes en ville ?"