Nano. RolePlay

Rappel du premier message :


Nouvelle ville, nouveau spectacle. L'homme se produisait en marge du marché, au calme. Jongleur et musicien, son apparence était banale mais on le disait talentueux. Il vivait chichement, mais au moins ne dépendait de personne. Et c'était aussi son cas. Jusqu'ici d'une discrétion absolue, mais d'une volonté à toute épreuve, il ne s'était jamais laissé porter, et s'était vite rendu indispensable.

Aujourd'hui, il allait sortir de l'ombre, et l'homme en était fier. Pinçant les cordes du luth, il s'était assis à côté de la fontaine pour lui laisser place. Petite et circulaire, c'était elle qui l'avait inspiré. Un décor idéal pour ses premiers pas en tant qu'artiste.

Et ses premiers pas furent remarqués. L'homme savait qu'on ne l'observait pas pour son talent - pas encore. S'il percevait son potentiel, eux ne voyaient pour l'heure que son aspect. Un être blanc, tout de blanc vêtu. Il avait commencé à tourner sur la margelle, une chorégraphie très simple, seulement ponctuée par les notes du luth. Il le sentit se braquer sous les regards, mais il continua néanmoins, jusqu'à la dernière note, jusqu'au dernier pas.

Le clou du spectacle parut presque fade après cette étrange apparition, les flammes qui sortaient de la bouche de l'homme étaient pourtant dignes d'un dragon et prenaient des teintes improbables. Les applaudissements firent place aux murmures : ignorant son identité, on l'avait surnommé l'elfe blanc.

Ouh. Celle là allait faire mal. Vu l’élan et la force du bras armé, le gamin n’allait pas en réchapper. La pierre fonça vers le crâne mais dévia au dernier moment, prit dans un courant d’air puissant.

Arior se tourna vers Satel.

- Je pense qu’il serait dommage de les tuer. Qui connaîtra notre courroux s’il ne reste personne pour en témoigner ? Ce n’est pas comme ça qu’on construit une légende.

Il lui adressa un coup d’œil.

- Je pense que la leçon a été apprise.

Serrant les dents et le poing, l'elfe blanc détourna le regard.

Quelle légende.

Les mioches, eux, se réveillaient un peu devant l'accalmie. Celui qui avait failli se prendre la pierre de plein fouet ne pipait mot.

C'est pas nous m'sieur ! C'était son idée ! C'est lui qui vous a insulté !
Comme c'est commode.

Il darda un dernier regard sur le groupe, et leur adressa pour la première fois un sourire, sincèrement mauvais.

Bonne chance... avec l'elfe noir.

Il tourna les talons.

Le sorcier jeta un coup d’œil à Satel. Oh, ces enfants ne resteraient pas impunis. Levant une main menaçante, intimant le silence, il se mit à psalmodier dans une langue aussi antique qu’éteinte. L’air autour de lui devint lourd, de chargea de quelque chose de malsain et de terrifiant. Il ouvrit la main devant lui et souffla comme pour envoyer quelque chose d’invisible sur les petites formes qui hurlèrent. Puis l’atmosphère glauque retomba doucement.

- Allons-y.

Invita t’il Satel en le laissant passer devant.

- Je t’assure que ça les poursuivra longtemps.

Si tu le dis.

Il ralentit le pas, permettant ainsi à l'elfe noir d'être à sa hauteur.

Où m'emmènes-tu ?

- Et bien boire un verre ! Quoi d’autre ?! C’était ce qui était prévus, non ?

Pas perturbé le moins du monde il se retourna pour regarder les gamins.

- Oh, une dernière chose, j’arrive.

Il se retourna et fit quelques pas en arrière, s’accroupît et posa sa main sur le sol, redonnant l’aspect initiale au sol qu’il avait transformé en sable mouvant. Il prononça quelques mot rapides et un gamin cria de nouveau mais Arior s’en détourna bien vite, retrouvant Satel pour se rendre dans une de taverne mal fréquenté de la petite ville.

Faisant silence, l'elfe blanc se contenta de secouer légèrement la tête en soupirant. Il ne regarda pas en arrière quand son compagnon fit demi-tour, ni quand il revint. Il continua à marcher d'un pas égal, bien qu'il se laisse guider malgré les apparences. Arrivés à proximité de leur destination, sa voix se chargea d'ironie.

J'ai ma réponse.

Arior le précéda et entra. Il trouva des yeux une table vide et s’y installa accompagné de Satel. Il commanda une liqueur fruitée -et cher- et laissa l’elfe albinos faire sa commande.

- Alors, raconte moi, qu’es tu devenu après notre rencontre ? Et qui est cet homme avec qui tu... voyage ?

Le sorcier était curieux de savoir ce qui était arrivé à l’enfant indépendant qui avait alors refusé de le suivre.

Dans un premier temps, l'elfe blanc ne commanda rien, et n'émit aucun souhait sur ce qu'il souhaitait boire, ou même manger. Assis à la même table que l'elfe noir, il ne put masquer le réflexe d'un regard circulaire. Mal famée ou pas, leur duo attirait les regards dans cette taverne, qui avait dû voir passer son lot d'elfes noirs. Il grimaça, avant de reporter son attention sur son compagnon. Son regard d'obsidienne n'avait pas changé, sauvage et insoumis, avide de liberté.

Je n'ai pas l'habitude de parler de moi.

Encore maintenant il se montrait fuyant. Méfiant. Mais pire, il était... renfermé ? Il y avait une distance supplémentaire chez lui, quelque chose d’autre qu’il n’y avait pas eu enfant. Des blessures peut être. Ou autre chose.

- Très bien. Je boirais donc seul et en silence.

Déclara le sorcier en avalant une gorgée du liquide qui lui réchauffa la gorge.

- Ou bien veux tu me parler de ton compagnon de route ?

Le coude appuyé sur la table, il ferma les yeux.

Je ne sais pas boire.

Son autre main tapota le bois avant qu'il ne se redresse. Il regarda son compagnon boire, avant de se lancer, une émotion sincère profondément ancrée dans ses yeux noirs.

Tu m'as vu danser ?

Il ne s'attendait pas à cette question. La prenant au sérieux, il reposa lentement son verre.

- Je t'ai vu, oui.

Et il avait été captivé, comme tous les autres.

- Tu te débrouilles bien. C'est lui qui t'as appris ou...

Le connaissant...

- As tu appris seul ?

Baissant légèrement les yeux, il joignit les mains sur la table. L'enthousiasme dans son regard ne mentait pas. Quoique léger, l'elfe blanc esquissa ce qui ressemblait pour la première fois à un vrai sourire.

Ce n'est pas que mon apparence alors.

Il regardait ses mains.

Il fait beaucoup de choses, mais il ne danse pas... comme ça.

La tonalité de sa voix laissait entendre un certain tact, une tournure de phrase pour ne pas se montrer blessant. Le jeune elfe finit par ajouter, à retardement.

Il s'appelle Jordi.

Jordi. Ah ! Voilà un nom sur cet homme qui avait visiblement su faire mieux que lui dans l'apprivoisement de ce petit être sauvage. Une chose qui piquait autant son orgueil que son envie d'en savoir plus.

- Depuis combien de temps voyages tu avec Jordi ?

Son ton de voix restait égal mais à l'intérieur de lui il n'en était rien. Ressentait-il de la jalousie ? Sans aucune doute, oui.

Le visage de l'elfe avait retrouvé un peu de son insouciance, mais cela ne signifiait pas qu'il était prêt à répondre à n'importe quelle question ou était incapable d'en percevoir le sens caché. Il appuya sa joue sur son poing, dévisageant son homologue à la peau noire avec un petit sourire en coin.

Depuis un moment.

Un moment, hein ? Il faut croire que Satel n'avait rien perdu de sa malice.

- Te méfies tu de moi ?

Lui demanda t-il finalement franchement. Pas de détour avec ce petit sauvage, autant essayer la méthode à bâtons-rompus.

Posant un doigt sur ses lèvres, il fit mine de réfléchir. Trop peu de temps pour paraître crédible. Il haussa les épaules.

Tu es un elfe noir.

Comme si la réponse coulait de source. Il pinça légèrement les lèvres, les yeux mi-clos.

Tu as aimé ?

Imitant son jeune comparse, Arior fit mine de réfléchir à cette question.

- Je ne sais pas si je dois répondre à cette question... Tu es un elfe noir toi aussi, n'est ce pas ?

Il sourit en coin, mais loin de vouloir braquer Satel, il baissa vite les armes.

- C'était suffisamment intéressant pour que je reste à regarder plutôt que d'aller contenter mon estomac vide.

C'était un "oui" en somme.

Il ferma les yeux complètement, même si ce ne fut que pour un instant. Le sourire qui flottait sur ses lèvres rappelait un peu le sentiment soulevé dans le public au moment du spectacle. Un être dont la féérie ne demandait qu'à s'éveiller.

Je vais m'améliorer.

C'était presque étrange de le voir ainsi. Emu, habité, souriant, décidé... Il avait trouvé là quelque chose qui semblait le toucher profondément. Quelque chose de son essence. Peut-être même une raison d'exister. Un sentiment qui n'était pas étranger à Arior, bien qu'il le vive sans doute d'une façon différente.

- Je n'en doute pas, Satel. Pas du tout. J'ai hâte de voir ce dont tu seras capable. Enfin... si tu parviens à rester en vie. N'est ce pas ?

L'elfe blanc cligna des yeux, comme revenant à une réalité qu'il n'avait pourtant jamais abandonnée. Si le compliment avait pu le toucher, il ne restait que la marque de son interrogation.

Pourquoi n'y parviendrais-je pas ?

- Parce que tu m'a l'air bien impulsif et imprudent pour un elfe seulement armé d'une pierre. Peut-être devrais tu apprendre à te défendre avant de mettre en colère la mauvaise personne ?

Une simple suggestion... qui à son sens lui servirait -et bien- pour le reste de sa vie.

Son attention était revenue entière à la conversation, le corps tendu vers son interlocuteur.

Je sais me battre. J'aurai une arme quand je l'aurais décidé. Il ajouta, avec un geste de la main : Je ne mets en colère personne.

Main qu'il avança. Il attrapa le verre de l'elfe noir, pour en boire une gorgée. Juste une. Ses yeux noirs plongèrent dans l'azur, francs et intenses. Un petit sourire à la commissure des lèvres.

Pourquoi ? Tu veux m'apprendre ?

- À te battre ? Avec une arme ?! Oh non, j’en serais bien incapable ! Je suis un sorcier, pas un guerrier. Mas seule arme est la magie. La maîtriser demande beaucoup de temps et d’entraînement. Cela dit, je pourrais te l’apprendre si tu le souhaites.

Il n’avais pas l’impression que Satel avait quelque inclinaison vers cette discipline. Mais qui sait... mieux valait tard que jamais si c’était son souhait.

Les mots de l'elfe noir le rendirent pensif. Il fit tourner le verre dans sa main, sans toucher à son contenu.

Je n'ai jamais pensé apprendre la magie.

Repoussant la boisson vers son propriétaire, il le regarda à nouveau, mais l'intensité de son regard n'était rompue cette fois par aucune ironie.

Comment sait-on que l'on peut ?

- Il faut essayer. Il est vrai que tout le monde ne peut pas avoir accès à ça mais... et bien il se trouve que j’ai aussi la capacité de vérifier ça, en quelque sorte. Ce n’est pas très agréable mais ce n’est pas douloureux non plus.

A lui de prendre la décision. S’il était d’accord, Arior pourrait sans aucune mal tester ses capacités.