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Pachouliboukoualoubouzoulek, sa vie, son oeuvre.

Pazou

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Pazou
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Première contribution : le texte présenté pour la 4e épreuve de l'Interforum 7 qui a été effacé suite à la fermeture du forum hôte, La Sérénissime,


La Folie des Grandeurs


Pachouliboukoualoubouzoulek planait au-dessus des monts Krokdor, en route pour le Pic. Son esprit battait la campagne, enfin la montagne en l’occurrence : il rêvassait aux meilleurs moyens de dominer le monde. Déclencher un méga-tsunami peut-être ? Il avait une petite expérience en tsunamis. Ou une invasion de fourmis ? Il avait aussi découvert récemment un sort qui faisait rétrécir les oreilles, et il était assez curieux de le tester. Enfin, quand il aurait réparé son atelier.

Le temps fila en rêves éveillés, et Pachouliboukoualoubouzoulek atteignit bientôt sa montagne. Alors qu’il se contentait d’habitude d’emprunter l’entrée aérienne jusqu’à son vestibule intérieur, un détail inhabituel attira ce soir-là son attention vers l’endroit où il avait installé sa boîte aux lettres. En réalité, le dragon ne connaissait personne susceptible de lui envoyer du courrier, mais il avait toujours eu envie d’avoir une boîte aux lettres. C’était civilisé. Il s’était même spécialement abonné à une revue de cosmétiques pour hiboux histoire de la justifier.

Bref, ce soir-là, un bout de parchemin dépassait de la boîte, ce qui était suffisamment rare pour intriguer Pachouliboukoualoubouzoulek. Après avoir essayé plusieurs fois sans succès de récupérer le parchemin avec son bec, le dragon hurla, à bout de patience :

- BEEEEEEEJ !

Une petite créature ressemblant à une araignée ailée accourut à tire-d’aile, piaillant pour accueillir le dragon.

- Le parchemin, Bej ! Et qu’ça saute ! glapit le dragon impatient.

Habitué à ce genre de traitement, le familier ne se fit pas prier pour récupérer la lettre et briser le sceau. Puis il tendit le parchemin devant la tête de son boss pour que celui-ci puisse déchiffrer le message à la lumière du crépuscule. Il s’agissait d’une lettre de crédit d’une valeur astronomique, à dépenser dans l’établissement « Les Mets Gourmets des Roquets Coquets ». Pachouliboukoualoubouzoulek cria de surprise à la lecture de ce nom. Incroyable ! Toute créature dotée d’un palais digne de ce nom connaissait le restaurant le plus huppé d’Heavensaw, et sa plus célèbre spécialité, un met rare et recherché : l’œuf à la coque ! Rien que d’y penser, Pachouliboukoualoubouzoulek sentait son ventre gargouiller.

Par curiosité, le dragon-chouette contourna son familier pour examiner l’autre côté de la feuille. Un deuxième message l’attendait.

Salutations, Dizamachouraboukasek.
Ma sœur, j’ignore si ce courrier te parviendra un jour, et finalement je m’en moque. Je me meurs, et depuis ce bout de notre monde, je n’ai trouvé personne d’autres à qui léguer mes plus chères possessions. Alors si tu en trouves le courage et l’envie, viens récupérer ton dû ici, à Port-Nuage.
Je t’ai joint un petit avant-goût.
Dromadopouchimoupouzek


Fantasmatographique ! Le courrier était adressé à sa mère (paix à son âme), mais cela n’empêcha pas Pachouliboukoualoubouzoulek d’exulter à l’idée de récupérer l’héritage de son oncle. Il adorait les cadeaux. Mais il s’occuperait de ce port des nuages plus tard. La priorité, c’était d’aller déguster des œufs à la coque dans le plus grand restaurant du monde !

___


Outre les fameux œufs à la coque, ce qui rendait célèbre « Les Mets Gourmets des Roquets Coquets », c’était sa terrasse panoramique : le restaurant était perché sur une éminence rocheuse dominant la mer, et la vue de là-haut était époustouflante. Bien entendu, si les bipèdes devaient mériter leur repas en empruntant un chemin raide et escarpé, pour les dragons il suffisait de se laisser planer et de profiter.

Pachouliboukoualoubouzoulek, lui, n’était pas là pour la vue. Pendant tout le long voyage qui l’avait amené jusqu’ici, les œufs à la coque n’avaient pas quitté son esprit. Aussitôt atterri, il s’adressa au majordome qui venait à sa rencontre d’un ton péremptoire :

- Par ici, bouffi ! Je suis Pachouliboukoualoubouzoulek et je suis là pour bien manger, alors tu vas me faire le plaisir de me libérer une table fissa. Oh, et pas la peine d’aller chercher le menu, j’ai déjà choisi : je prendrai la totalité de vos œufs à la coque.

Après tout, pourquoi laisser des ignares comme des elfes ou des humains profiter de mets si délicats qu’ils devraient être réservés aux papilles des dragons ? Il serait le seul à manger des œufs aujourd’hui. Le majordome s’inclina par réflexe comme pour prendre note de sa commande puis s’immobilisa, catastrophé, en prenant la mesure des requêtes déraisonnables du dragon-chouette.

- Monsieur, pardonnez-moi, c’est impossible ! Tous nos œufs à la coque ?! Il déglutit avant de poursuivre. Comprenez-moi, Monsieur, des gens de qualité viennent jusqu’ici pour goûter notre spécialité. Nous ne pouvons pas les renvoyer ! Je suis sûr que vous comprenez. Evidem….

- Tais-toi donc, bouffi ! répliqua un Pachouliboukoualoubouzoulek passablement agacé. Il se pencha sur le majordome, le toisant du haut de ses quatre mètres.  Chercherais-tu à m’énerver ? Je suis le plus gourmet des gourmets qui visiteront jamais cet endroit, il n’est que naturel que je reçoive l’exclusivité de la spécialité du chef ! Je suis sûr que tu seras d’accord avec moi, bouffi. Il insista, penché à presque toucher l’homme. Non ?

Intimidé, le majordome hocha la tête. Il faut dire qu’il était nouveau dans le restaurant, c’était son premier client difficile et le pauvre perdait un peu ses moyens. Rayonnant au contraire d’autosatisfaction, le dragon-chouette se redressa et fit un signe à son familier qui s’approcha avec la lettre de crédit dans les pattes.

- Bien entendu, j’ai les moyens de vous dédommager de votre peine. Je ne suis pas pingre, par la barbe d’un coléoptère ! Je suis prêt à y mettre le prix.

La vue de la somme présentée rassura quelque peu le majordome, qui s’esquiva pour exécuter les ordres. Le dragon s’installa pour attendre en grognant après Bej à propos de la lenteur des services de restauration.

___


L’attente fut finalement courte : un nouveau venu fit bientôt son apparition dans le vestibule, traînant derrière lui le pauvre majordome ainsi que deux énergumènes à l’air patibulaire. Il était vraiment petit, celui-ci, malgré la toque qui le grandissait de vingt centimètres. Pachouliboukoualoubouzoulek le détailla avec dans l’œil une lueur d’intérêt.

- Tu es un nain, affirma-t-il, récoltant dudit nain un regard exaspéré devant une telle évidence. Pachouliboukoualoubouzoulek poursuivit sans y faire attention. Où sont mes œufs, nain ? J’ai diablement faim.

Le chef prit un air encore plus ennuyé pour répondre, adressant un signe aux brutes derrière lui tout en répondant.

- Je suis désolé, Monsieur, mais cet établissement n’accueille pas les chouettes. Je vous prierais de bien vouloir quitter les lieux au plus vite sans faire d’esclandre.

A cette insulte, Pachouliboukoualoubouzoulek eu un mouvement de recul. Les deus brutes, qui avaient de la bouteille, s’avancèrent d’un air menaçant. Ils portaient des gourdins parsemés de piques, à l’allure dangereusement pointue.

- KEEEUUWA ! Quel odieux… terrible… quel… jamais…

Le pauvre dragon en perdait ses mots. Comment osait-on le traiter de la sorte ? Comment osait-on le comparer à ces ridicules créatures sans cervelles, ces chouettes sans ambitions, lui, le futur maître du monde ? Pris d’une vertueuse fureur, Pachouliboukoualoubouzoulek se dressa de toute sa hauteur pour foudroyer son auditoire du regard.

- Tu oses m’insulter de la sorte, pauvre petit nain de pacotille ? Je suis un dragon, bouffi ! Le grand Pachouliboukoualoubouzoulek, Terreur des Faibles, Maître du Pic ! Je ne laisserai pas passer pareille insulte ! Prosterne-toi et quémande mon pardon. Peut-être me laisserais-je aller à t’épargner…

Et amène-moi mes œufs !


Insensible à la colère du dragon le nain se contenta de hocher la tête.

- Monsieur, pardonnez-moi, je suis à peu près sûr de savoir à quoi ressemble un dragon. Le ton était courtois mais saupoudré de mépris. Nous sommes un établissement respectable, monsieur. Nous ne pouvons nous permettre de laisser entrer n’importe qui sur parole. Ces messieurs vont vous raccompagner. Je vous prie de ne pas faire de difficultés, où ils seront contraints d’utiliser la force.

Plus humilié que jamais dans sa vie, Pachouliboukoualoubouzoulek se vit toutefois contraint de reculer sous la pression des deux brutes. Il ne tenait pas à se prendre ces fichues piques dans les plumes ! Toutefois il ne se priva pas de hurler ce qu’il pensait de ce traitement tout en battant en retraite.

Il puisa dans son vocabulaire pour abreuver le nain d’insulte puis, quand ce dernier fut hors de vue, il continua à déverser sa bile sur les deux brutes. Arrivé à reculons au bord de la falaise, il fut forcé de s’envoler, mais jamais il ne cessa de hurler, cassant les oreilles de Bej sur tout le chemin du retour. Arrivé au Pic, il avait pris une importante résolution : plus jamais il ne mangerait d’œufs !



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